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Une année sans profit pour certains producteurs maraîchers

le lundi 26 octobre 2020
Modifié à 16 h 32 min le 26 octobre 2020
Un texte de Caroline Morneau - Collaboration spéciale de La Terre de chez nous Alors que les récoltes maraîchères tirent à leur fin, Denys Van Winden prévoit déjà terminer la saison 2020 «sans profit ou presque». Le copropriétaire de Productions horticoles Van Winden, en Montérégie, attribue le phénomène à ses coûts de production qui ont été plus élevés que la moyenne et à des baisses de rendements aux champs de l’ordre de 40%. «Si la tendance se maintient, on ne fera à peu près pas de profit. Ça arrive peut-être une fois aux sept ans, note l’agriculteur de Sherrington, dont certains légumes racines et quelques laitues sont encore à récolter. On aura une idée plus claire quand tout sera fini pour de bon, mais pour l’instant, ça s’enligne pour être une année à oublier», se désole-t-il. Les frais d’irrigation qu’il a dû assumer pendant la sécheresse cet été sont de 15% supérieurs à une année normale, explique le producteur, en comptant l’énergie au diesel requise et les frais de main-d’œuvre pour l’installation des équipements. La météo peu clémente cette année a par ailleurs entraîné une baisse de rendement importante de ses oignons et de ses carottes. «Le marché est bon pour les oignons, les prix sont là, mais les rendements aux champs ne sont pas bons», soutient-il, ajoutant que 40 à 50% de ses carottes ne sont «pas vendables» parce qu’elles sont «croches» ou en mauvais état. Les laitues qu’il a semées en moins grande quantité, par manque de main-d’œuvre, accusent quant à elles du retard avant d’arriver à maturité. 40 hectares de culture détruits par la grêle De son côté, Jocelyn Dugas, un producteur de Lanaudière, craint de terminer l’année avec un déficit. «C’est la pire année que j’ai jamais connue», laisse-t-il tomber. Après avoir perdu 70 à 80% de ses récoltes, en raison de la canicule, cet été, un épisode de grêle survenu le 10 octobre a détruit 40 hectares de choux, de navets et de betteraves. «Je ne sais pas si je pourrai les sauver, se désole le producteur de Saint-Roch-de-L’Achigan. Ça allait bien pour mes choux, cette année, jusqu’à ce qu’il y ait de la grêle», précise-t-il, ajoutant au passage que ses récoltes de carottes et d’oignons sont particulièrement désastreuses. Des hauts et des bas Le directeur général de l’Association des producteurs maraîchers du Québec (APMQ), Jocelyn St-Denis, constate que les producteurs sont particulièrement «débordés» et «brûlés» cette année. «Pour certains, 2020 est une bonne année. Pour d’autres, ça a été ordinaire, voire désastreux», soutient-il. Son organisation prévoit être en mesure de brosser un compte-rendu plus détaillé de la saison seulement à la fin novembre.

De conséquences à la fermeture des restaurants 

Denys Van Winden, qui connaît une saison difficile, se consolait jusqu’ici avec les prix avantageux offerts aux agriculteurs pour la laitue. Avec la fermeture récente des salles à manger de restaurants néanmoins, il ne parvient plus à les vendre à ses distributeurs pour le marché frais. Le producteur de la Montérégie, depuis quelques semaines, se tourne donc davantage vers les marchés de la transformation et de l’exportation vers les États-Unis. «Les prix sont beaucoup moins avantageux que pour le marché frais local, mais c’est mieux que rien», indique-t-il. Olivier Barbeau, agriculteur de Saint-Jean-Baptiste en Montérégie, remarque le même phénomène du côté du persil frisé. «Depuis que les restaurants ont fermé pour la première fois au printemps, il n’y a pas de demande pour ce produit. Les activités en restauration ont repris un peu durant l’été, mais jamais complètement. Ça paraît», note-t-il, affirmant que la baisse de la demande occasionne des prix «de pas bon à mauvais» pour le persil frisé, qu’il choisit d’exporter en Ontario et aux États-Unis.

Le baume des prix avantageux

Si pour certains producteurs maraîchers, l’année 2020 est à oublier, elle s’avère «correcte», voire «dans la moyenne», pour d’autres. Bien qu’il ait encaissé des pertes de laitues et de brocolis, Olivier Barbeau constate que les prix avantageux pour ces légumes ont mis un baume sur sa saison. «J’ai presque fini la récolte d’oignons jaunes. Les rendements ne sont pas terribles, mais peut-être que les prix seront bons pour ces légumes aussi», espère le producteur de Saint-Jean-Baptiste, en Montérégie. Quant à ses premières récoltes de carottes, elles n’ont guère été mieux, admet-il, avec les canicules de l’été. Celles qu’il a semées plus tard dans la saison et «qui s’en viennent», toutefois, devraient être de bonne qualité, anticipe-t-il. Benoît Lauzon, producteur à Oka dans les Laurentides, s’attend quant à lui à des rendements «dans la moyenne». Bien que les gels hâtifs en septembre aient abîmé ses récoltes de poivrons verts et de courges, et que la chaleur cet été ait brûlé une partie de ses choux-fleurs, il remarque lui aussi que les «bons prix» viennent compenser les volumes aux champs «ordinaires».