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Tarifs douaniers : entre incertitude et préparation pour la suite

Il y a 5 heures
Modifié à 11 h 36 min le 06 février 2025
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

Au sein de l’agglomération, 90% des quelque 600 entreprises exportatrices exportent aux États-Unis.(Photo: Le Courrier du Sud - Archives)

Le premier ministre François Legault l’a martelé, l’incertitude engendrée par le sursis de 30 jours accordé par le président Trump sur l’imposition de tarifs douaniers au Canada cause aussi du tort à l’économie. Un constat qui se ressent sur le terrain.

Au Québec, l’aéronautique sera durement affectée par d’éventuels tarifs douaniers de 25%. Dans l’agglomération de Longueuil, cette menace affecte plusieurs entreprises, tout particulièrement les transformateurs d’aluminium et de métaux, ainsi que les fabricants de pièces aérospatiales.

Chez une entreprise en aérospatiale de la Rive-Sud, il est difficile de pleinement mesurer les répercussions si Trump mettait sa menace à exécution. «Si j’avais la réponse, je serais content de vous le dire! Mais 25%, ça change beaucoup de choses. Ce ne serait pas la faillite, mais ça aurait un gros impact sur nos activités», témoigne le directeur général, qui demande l’anonymat. 

«On a contacté beaucoup de nos clients, mais ils n’ont pas de réponse à nous fournir, ils n’ont pas eu de directives de leurs gestionnaires», ajoute-t-il.

Une même incertitude plane aussi lorsque cette entreprise contacte des départements du gouvernement américain, qui figure sur sa liste de clients. «Ce n’est pas clair si les tarifs vont s’appliquer aux contrats publics. Normalement, un tarif de 25% serait refilé sur la facture du client, mais là, est-ce que le gouvernement paiera cette hausse?» s’interroge-t-il.
Le directeur ne cache pas que cette période d’incertitude génère beaucoup de stress.

Une riposte pas sans risques

Parmi la quinzaine d’entrepreneurs avec qui Développement économique agglomération de Longueuil (DEL) a pu discuter au cours des derniers jours se trouve Simaudio, une entreprise de fabrication du secteur de l’audio haut de gamme. Pas moins de 35% de son chiffre d’affaires est destiné aux exportations aux États-Unis.

En entrevue au balado Ceci n’est pas une revue de presse, la leader en chef de DEL Julie Éthier évoquait sa réalité.

«Chez Simaudio, on me disait : en plus du [tarif américain de] 25%, j’importe certaines pièces qui seront peut-être taxées également : c’est un autre 25%. Et mes compétiteurs qui vendent ici, pour l’instant, leurs produits ne sont pas taxés, alors je n’ai pas d’avantages compétitifs sur le territoire ici», rapporte Mme Éthier. 

Rappelons que le Canada avait annoncé les couleurs de sa riposte avant que Donald Trump n’accorde un sursis. Il était prêt à livrer une première contre-attaque de tarifs de 25% sur certains produits. Québec était aussi prêt à réagir, et les villes demeurent en lien avec le gouvernement.

Au sein de l’agglomération, 90% des quelque 600 entreprises exportatrices exportent aux États-Unis.

Les solutions

Julie Éthier réitère un message maintes fois lancé aux entreprises depuis les dernières années : la diversification des marchés et des changements dans la chaîne d’approvisionnement, tout comme une hausse de la productivité qui passe par l’innovation, sont inévitables. Il s’agit toutefois de solutions à moyen et long terme, pour lesquelles une corporation économique telle que DEL peut apporter son soutien.

Le rôle de DEL est aussi de multiplier les représentations auprès des gouvernements afin d’apporter une aide à court terme. «On s’attend à des mesures fiscales, de maintenir et même d’augmenter les crédits d’impôt, de diminuer le fardeau fiscal des entreprises», énumère-t-elle dans le balado.

Les gouvernements doivent aussi faciliter le commerce interprovincial, avance Mme Éthier. «Ce n’est pas normal que ce soit complexe de faire affaire avec nos voisins. Dans un contexte où il faut acheter localement, ça doit être une priorité.»

En entrevue avec Le Courrier du Sud, le directeur de l’entreprise en aérospatiale confirme que de développer des liens avec de nouveaux clients d’autres marchés prendrait des années, d’autant plus que la compagnie exporte déjà un peu partout dans le monde.  

Il dit miser pour l’instant davantage sur des solutions innovantes pour modifier quelque peu ses façons de vendre ses produits.

Il ne partage pas l’avis de Mme Éthier sur la nécessité que les gouvernements déploient des aides directes aux entreprises. «Je ne crois pas que ce soit la solution. Il y a déjà trop de taxes, trop de dettes, on ne veut pas que les gouvernements jettent de l’argent à tout le monde. Les efforts devraient être consacrés à tout faire pour que les tarifs américains ne soient pas appliqués, à rendre M. Trump content de nos actions, si c’est possible…»

 

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